ayant relu le sujet en entier,
je me permets de faire un point d'étape, histoire de relancer le débat:
d'abord, considérons qu'il n'y pas d'antinomie entre aspiration individuelle à l'évolution de sa propre conscience et aspiration collective à l'évolution des structures,
en revanche il y a bien contradiction entre aspiration individuelle ou collective au changement de société et refus d'interroger ses propres actes, jugements et pensées en tant qu'ils participent à la perpétuation du "système".
bien souvent l'évolution intérieure que nous pouvons nommer "conscientisation" conduit à osciller entre deux écueils:
la schizophrénie sociale et le délire social
- la schizophrénie sociale consiste à agir au quotidien en contradiction avec ce que notre conscience nous dicte
- le délire social consiste à chercher à vivre en dehors du monde pour tenter de mettre en accord conscience et actes quotidiens.
je ne m'attarderais pas sur le délire social, peu de gens sont concernés, il s'agit par contre de garder en tête que la tentation individuelle ou communautaire de s'abstraire du "monde" une fois qu'on l'a reconnu comme "nocif" ou "absurde" ne peut pas avoir plus de valeur qu'une bouteille à la mer. Croire en la possibilité de transformer le monde par un travail sur soi ou en restant dans un entre-soi au fond d'une forêt porte le risque de voir son petit potager bio dévasté par une horde d'insectes transgéniques que le cours des évènements du monde que nous aurions délaissé aura produit...
la Schizophrénie sociale, elle, concerne la plupart des gens à des degrés divers. Notre civilisation a inventé tellement d'outils pour s'en accommoder que la plupart d'entre nous ne se rende même pas compte qu'un simple regard en surplomb sur leur vie pourrait en révéler toute l'absurdité.
Séparation de la sphère privée d'avec les actes accomplis au travail, raison instrumentale qui permet de se focaliser sur la résolution technique d'un problème sans avoir à s'interroger sur son bien-fondé, idéologie de la réalisation de soi qui permet de jouir sans s'interroger sur les conséquences de cette jouissance, valeur d'autorité qui permet de satisfaire sa conscience par l'acte d'obéissance sans en interroger la portée, parcellisation des tâches qui permet de se dédouaner d'une responsabilité individuelle dans la réalisation d'une horreur collective, etc., etc.,
autant "d'outils cognitifs" servant à accorder sa conscience tout en accomplissant des actes dont l'addition à ceux des autres produit un monde oppressant.
Pour beaucoup, la simple prise de conscience de cette schizophrénie est une telle angoisse qu'il leur est préférable de s'abandonner au conformisme, non plus seulement à l'extérieur d'eux-même mais jusque dans les profondeurs de leur être, ils se laissent gouverner par le surmoi.
Pour d'autre, la prise de conscience peut être difficile, malêtre, étrangéité à soi qui conduit au cynisme, actes auto ou hétéro destructeurs, toute prise de conscience ne vaut pas acte de résistance efficace, le résultat versant déprime comme versant délinquant ou terroriste est un affaiblissement du potentiel révolutionnaire de la prise de conscience, soit un point d'appui de plus pour la force coercitive du système de domination en place.
on le pressent, la conscientisation ne conduit pas mécaniquement à saper les fondements de la domination d'une élite puissante, sûre d'elle-même, solidaire et consciente de sa position de force.
Comme un des textes cités plus haut le précise, ce travail de sape porte ses fruits si les "conscientisés" (ceux qui se reconnaissent comme schizophrènes et qui en ont assez d'être des collaborateurs passifs à leur propre aliénation) se reconnaissent entre eux: d'où l'appel de Marx et Engels "prolétaires de tous les pays unissez-vous!" et l'appel de la forêt de Lacandon à créer des ponts entre toutes les résistances.
j'aurais tendance à aller dans le sens de l'auteur du texte cité, la forme parti est un embryon d'organisation, un tentative ratée ou tout du moins partielle.
d'une part, la sagesse commande de connaitre son adversaire. Une fois que l'on reconnait que cet "adversaire" est pluriel, protéiforme, insaisissable, et en bonne partie dans nos consciences et dans nos actes,il est ceci et cela selon l'angle duquel on l'observe,
il est stupide de chercher à l'anéantir par une quelconque attaque frontale, par une seule forme de lutte et de croire à sa mortalité...l'horreur est humaine, elle sera toujours présente
D'autre part, toute attaque contre un pouvoir oppresseur qui consiste à chercher à atteindre le même degré de force pour terrasser son adversaire sera vouée à l'échec et m^me la technique du judo ne sera d'aucune utilité: ce serait confondre un combat contre l'oppression avec un combat entre oppresseurs et oppressés. la distinction entre amis et ennemis étant pour le moins très floue, le carnage n'est pas loin...
Dès lors, la question "comment chercher à diluer le pouvoir oppresseur" ne peut trouver de réponse unique. L'important, dans ce processus de conscientisation consiste à se reconnaitre comme participants, sous des formes diverses, à la construction d'une autre réalité, réalité partagée mais plurielle. Alors certes il faut bien s'accorder sur un certain nombre de points et de valeurs. la première consiste à reconnaitre l'unité de l'humanité et tout ce qui va avec, la seconde consiste à s'obliger à ne pas oeuvrer à la répétition des schémas oppresseurs, soit, à minima, ne pas chercher à prendre le pouvoir, mais chercher à prendre et laisser la part de pouvoir qui revient à chacun.
Autrement dit, la bataille sera victorieuse si elle se joue sur un terrain où le pouvoir sera toujours perdant. On peut considérer que quelques attaques frontales sont autant de coups de com' sensés réveiller les "gens", encore faut-il que ces gens réveillés puissent changer le cours de leur vie et s'amarrer à un mouvement de fond, trouver des champs d'action quotidienne où ils n'ont pas à jouer au héros ou au soldat mais simplement à poser les pierres d'un édifice solide et pérenne. L'important dans tout ceci étant que la participation ne soit pas un à-côté dans une vie de soumission mais bien la vie elle-même, ou du moins que la plupart des actions "militantes" soient en fait autant de pas en avant vers la construction d'une vie qui s'abstraie de la dépendance au "système".
Tel me semble être dans une perspective à la fois individuelle et collective la recherche du juste milieu entre schizophrénie sociale et délire social: rester dans le siècle, dans le monde, tout en oeuvrant à la création d'ilôts en expansion reliés entre-eux qui accueillent en leur sein de plus en plus de participants.
par exemple le devoir d'une démarche syndicale horizontale peut être, à l'intérieur des structures du capitalisme, d'oeuvrer à la prise de conscience du salarié de sa condition de semi-esclave et de sa capacité d'autonomie, mais aussi et surtout de construire, au moins partiellement en dehors des critères d'efficacité capitaliste, des entreprises au sein desquelles chaque nouvelle recrue correspond à la délivrance d'un salarié, hier encore servant les objectifs absurdes et égoïstes d'actionnaires cupides.
Le devoir du réseau des "conscientisés" consistant sur ce point à soutenir ces entreprises "amies" par leur consommation.
en multipliant les exemples, on s'apercevra que les initiatives sont déjà présentes, la plupart du temps, ce sont les ponts et les noeuds de réseaux qui sont à densifier, et notre action à partir de ce site me semble intéressante en termes de diffusion du principe démocratique, non pas seulement pour une constitution, mais comme principe de base de toute action collective. Car, en analysant un peu les choses, on s'aperçoit que la plupart du temps, ce qui bloque la fortification mutuelle des diverses initiatives et des énergies militantes, associatives, etc., et l'absence de perspective commune comme de ponts entre elles ce sont les barrières du "nous" et du "eux", renforcées par les hiérarchies et autres "prés carrés". la plupart des organisations un tant soit peu tournées vers l'amélioration du sort de l'humanité ne sont pas gouvernées sur le mode démocratique direct, pire, elles offrent une position de pouvoir à ceux-là même qui ont le moins intérêt à changer en profondeur les choses puisque le système leur offre de grandes satisfactions. Ainsi trop nombreuses sont les actions militantes qui visent consciemment ou inconsciemment à la stabilité de leur propre organisation et du système dans lequel elle finissent par être un rouage nécessaire.
Considérons maintenant les choses sous un angle temporel:
d'abord, l'étude du temps long ne nous offre une perspective évolutive que sur certains points, sur d'autres, nous pouvons voir des régressions.
pour voir les choses de manière positive, on peut admirer ce que Norbert Elias nomme le processus de civilisation de moeurs : c'est un processus fragile mais globalement progressif puisque les moeurs ont évolué de telle façon que l'on a tout de même tendance à remplacer le coup de gourdin par le dialogue.
Mais, si la barbarie et la violence des relations entre les individus est en nette régression, observer le résultat du jeu des structures et des institutions montre que notre Civilisation est sur ce plan très barbare (exclusion, délinquance, toxicomanies, suicides, maladies psychosomatiques, virus mutants, etc. ne sont que des symptomes).
Un groupe d'êtres humains, qui au temps jadis aurait regardé le supplice de la roue sans sourciller, peut très bien être très poli et ne pas vouloir faire de mal à une mouche, il n'empêche qu'il peut déclencher une famine d'un clic de souris dans une salle de marché...
l'intérêt de l'analyse d'Elias consiste également à reconnaître que le processus de civilisation des moeurs prend racine dans l'exigence aristocratique. en effet, c'est dans la société de cour que la politesse (courtoisie) se réinvente et par contagion se transmet peu à peu à toutes les couches de la société. On retrouve ici les idées exprimées dans les précédents posts: le travail sur soi pour parfaire sa conscience, sa capacité à dialoguer, les efforts pour vivre en harmonie avec les autres et la nature, ne sont pas autres chose que des exigences de noblesse.
Il ne s'agit pas de dire qu'il faut que la société soit dirigée par des petits groupes d'aristocrates pour que les moeurs se civilisent, bien au contraire, il s'agit de reconnaitre la valeur de l'exigence de noblesse dans un contexte communautaire. soit, non pas l'aristocratie du renoncement comme antidote à la barbarie mais l'exigence de soi et des autres de s'anoblir comme antidote à l'avilissement qui produit la barbarie. Le mot communautaire est ambigu, retenons simplement que la relation interhumaine est au centre de cette exigence de travail sur soi, elle ne peut donc se déployer dans une société d'atomes interchangeables mais bien dans des groupes où les gens se connaissent. L'important est que ces groupes soient reliés entre eux sans relations hiérarchiques pour "faire société".
c'est là où intervient le facteur temps comme problème crucial: si les contes peuvent légitimement célébrer le preux chevalier défenseur de la veuve et de l'orphelin, ou plutôt si le mythe justifiant la supériorité de la noblesse sur les vilains est recevable, la réalité de la société aristocratique, elle, interdit toute admiration pour ceux qui sont nobles par le titre et non plus par le geste et dont le combat consiste à préserver cet entre-soi et cultiver l'étanchéité entre nobles et non-nobles. Le problème est donc dans l'institutionnalisation de la noblesse comme relation de pouvoir et de supériorité entre un "nous" pur et raffiné et "eux" sales et rustres. La dérive est facile, il suffit juste d'être convaincu entre soi qu'on est supérieurs et de regarder ce que font les autres comme dégoutant, puis de considérer que celui qui fait une chose dégoutante nous est étranger, non pas parce qu'il agit de manière dégoutante mais parce qu'il est en soi un être dégoutant. Essentialiser de la sorte correspond à nier l'appartenance à une espèce commune, c'est un pas...vers les fours crématoires.
l'autre pas, on l'a vu c'est la raison instrumentale et la dé-personnification des relations et des actes, soit, la tragique similarité entre un clic à wallstreet et les coups de crayon de l'architecte d’Auschwitz.
les pas se franchissent d'autant plus facilement avec le temps, soit, l'oubli, qui est au coeur du processus d'institutionnalisation. dès qu'on institutionnalise quelque chose, on devrait prévoir sa remise en cause à moyen terme. castoriadis dit bien, au départ vous avez des institutions au service de la société, à la fin vous aurez une société au service de ses institutions. institutionnalisez la noblesse, et vous perdrez la vertu, le preux chevalier se transforme en perfide crétin dégénéré gavé du pain des veuves et orphelins.
Le temps est l'ennemi du sens des institutions, religion, loi, parti, organisation quelconque, il semble que toute institution finisse par perdre sa finalité première. Cela est très sain d'ailleurs, puisque la finalité se redéfinit au regard de ce que nous apprenons et de notre propre évolution. l'ennui c'est cette tendance à vouloir conserver à tout prix les structures avant de chercher à en redéfinir la finalité voire de les supprimer. de là nait la violence, la nécessité de briser des carcans devenus trop serrés. Il y a là aussi un problème de compréhension: deux hommes qui défendent la démocratie comme principe, si l'un défend l'idée de démocratie, et l'autre défend les institutions actuelles, les voilà ennemis.
Prendre conscience et agir, c'est peut être aussi faire voir le ciel à celui qui regarde le doigt...
Nous serons (sommes?) majoritaires à comprendre que ce à quoi Adam Smith voulait aboutir avec sa main invisible du marché est parfaitement louable mais que l'institution "marché" n'a plus sa place telle qu'elle dans notre monde, nous aurons le pouvoir de faire cesser l'enrichissement par la cupidité et l'égoïsme, là où je resterais prudent, c'est sur notre capacité à créer des institutions qui ne nous fassent pas basculer dans une autre forme de manipulation...saine méfiance non?
il semble alors évident que si la tâche du politique consiste à mettre cohérence, via des règles admises par tous, la conscience et les actes, les fins et les moyens, cette tâche est vouée à l'échec dès lors qu'elle ne prend pas en compte l'humanité comme à la fois
un tout appartenant à un même écosystème,
et une diversité d'individus perfectibles, non interchangeables .
C'est à dire que quand bien même la démocratie ne serait pas réalisée à l'échelle mondiale, l'impératif catégorique que doit suivre tout groupe d'êtres humains prétendant vivre en démocratie est de ne jamais prendre une décision ni permettre un acte qui puisse porter préjudice aux autres groupes, au moins en termes de ressources vitales et de dignité. Plus facile à dire qu'à faire...
Et de ne jamais chercher à imposer une règle comme éternelle, universelle, etc., car il se peut qu'un seul d'entre-eux ne puisse s'y conformer, et que ceux qui viendront après eux auront les moyens de la dépasser. Impossible à institutionnaliser à court terme, la remise en cause permanente de toute institution comme de toute certitude de l'esprit est la première arme contre la prolongation des injustices...
» Créer un nouveau parti politique
» Témoignage d´un véritable prêt acquis
» Témoignage d´un véritable prêt acquis
» Témoignage d´un véritable prêt acquis
» Témoignage d´un véritable prêt acquis
» Témoignage d´un véritable prêt acquis
» Témoignage, J'ai obtenir mon prêt avec Mr BERARD
» Témoignage, J'ai obtenir mon prêt avec Mr BERARD
» Témoignage, J'ai obtenir mon prêt avec Mr BERARD
» Témoignage, J'ai obtenir mon prêt avec Mr BERARD
» Témoignage, J'ai obtenir mon prêt avec Mr BERARD
» Témoignage, J'ai obtenir mon prêt avec Mr BERARD
» Témoignage, J'ai obtenir mon prêt
» Témoignage, J'ai obtenir mon prêt avec Mr BERARD
» Témoignage, J'ai obtenir mon prêt avec Mr BERARD
» Mais que c'est-il passé en Islande ?
» Manifestation du 05 mai
» Ma profession de foi
» Appel des indignés de Paris pour une Constituante